Depuis quelques années, le terme « résilience » est devenu un mot français à succès, largement utilisé tant par les psychologues que les politiques, par les enseignants que par les journalistes. D’où vient ce terme ? Que signifie-t-il exactement ? Qui est celui qui en a fait un tel buzz ?

D. Léotard - avril 2022

A l’origine, « resilience » est un mot anglais qui vient du verbe latin resilio, ire, littéralement « sauter en arrière », « rebondir, résister » (au choc, à la déformation). Depuis de longues années, il a été francisé par les physiciens qui l’utilisent pour caractériser l'énergie absorbée par un corps lors d'une déformation. Un métal résilient, par exemple, est capable de retrouver sa forme initiale après avoir été déformé.
Au XXe siècle, le mot désigne plus rarement une qualité humaine tel qu'utilisé par André Maurois dans son roman Lélia ou la vie de George Sand : « Dans ce deuil, une fois encore, elle étonna ses amis par son immédiate résilience.»
Dans le domaine de la psychologie, c’est dans les années 50 que Werner et Smith, deux psychologues scolaires américaines à Hawaï, travaillent avec des enfants à risque psychopathologique et qualifient de « resilience » le fait qu'un certain nombre d'entre eux « s'en sortent » grâce à des qualités individuelles ou des opportunités de l’environnement. Par la suite, l’américain John Bowlby a introduit le terme dans ses écrits sur l'attachement.
En Europe francophone, c'est le docteur Boris Cyrulnik qui, à la fin des années 1990, médiatise le concept de résilience en psychiatrie, à partir de l'observation des survivants des camps de concentration, puis de divers groupes d'individus, dont les enfants des orphelinats roumains et les enfants boliviens de la rue. Puis, à travers ses ouvrages, conférences et prises de parole, il documente et élargit le concept de résilience en psychologie humaine. 
 

C’est qui ce Cyrulnik ?

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Boris Cyrulnik est né en 1937 à Bordeaux (France), de parents juifs immigrés d’Europe orientale. Alors qu’il n’a que 5 ans, ses parents le placent en pension pour lui éviter la déportation. Tandis qu’il est ensuite déplacé à l’assistance publique, puis dans une ferme et enfin chez une tante, il comprend que ses parents sont morts.

Il fait ses études de médecine à Paris, puis se spécialise en neuropsychiatrie à Marseille. En 1968, il épouse Florence, une jeune médecin qu’il a rencontrée sur les bancs de la Fac, ils auront 2 enfants. Assez rapidement, il s'installe comme psychanalyste à mi-temps tout en donnant des consultations au centre hospitalier intercommunal de La Seyne-sur-Mer (où il connait le déclin des grands chantiers navals et les drames humains engendrés). Dans le même temps, il se passionne pour l’éthologie (l’étude du comportement animal), il crée d’ailleurs un groupe d’échanges en éthologie clinique qu'il anime jusqu'à la fin des années 1990 et enseigne depuis 1995/1996dans le cadre d'un DU (Diplôme Universitaire) en éthologie humaine de l'université de Toulon. Il publie en 1983 son premier livre intitulé Mémoire de singe et paroles d'homme, le premier d’une longue série. Il devient progressivement un vulgarisateur et un conteur à la voix apaisante à propos des comportements humains, des différences entre les individus face aux épreuves de la vie, etc… Il n’exerce plus comme médecin depuis 1999, année de parution de son livre Un merveilleux malheur qui a mis en lumière le concept de résilience en psychologie humaine.

Les années 2000 ont marqué son ascension dans le monde médiatique. Il devient en parallèle un expert consulté par des responsables politiques ou comités divers. En 2019, il s'est vu confier par le président Emmanuel Macron la présidence du « Comité des 1 000 premiers jours de l'enfant ».

Résilience : le concept

La résilience est une capacité psychologique qui consiste, pour un individu affecté par un traumatisme, d’un stress ou d’une adversité, à prendre acte de l'événement traumatique de manière à ne pas, ou plus, vivre dans le malheur ou l’angoisse ou la maladie et à se reconstruire d'une façon socialement acceptable. L’analogie avec les corps inertes qui retrouvent leur forme est évidente, c’est la capacité à « rebondir, à retrouver une vie telle qu’avant le traumatisme ». Selon B. Cyrulnik, le malheur n'est pas une fatalité, les résilients le prouvent : on peut toujours s'en sortir ! 

 

 BE2203251124 25/03/2022

Sources :
  • Entretien : Boris Cyrulnik, la confession , Le Point, 19 septembre 2008 
  • Documentaire Boris Cyrulnik. À l'assaut du malheur, de Youki Vattier, (diffusé sur France 5 le 13 mars 2009). 
  • « Force intérieure : trouver le courage en nous », Psychologies magazine, janvier 2002. 
  • Boris Cyrulnik. À l'assaut du malheur, documentaire de 52 minutes réalisé par Youki Vattier, dans la collection « Empreintes », France Télévisions Distribution, 2009.
  •  « Le travail peut être beau et rendre heureux », entretien avec Boris Cyrulnik, Acteurs de l'économie , 19 novembre 2010. 
  • Le Divan Marc Olivier Fogiel, France 3, émission du vendredi 30 novembre 2018

 

 

 

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