Le docteur Luc Colemont, médecin gastro-entérologue depuis près de 30 ans, est devenu le directeur général à temps plein de l’asbl « Stop Cancer Côlon » depuis 2016 pour pouvoir se concentrer pleinement à l'information et l'éducation sur le cancer colorectal.

G. Ostyn 

 

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« Lorsque j’étais un petit garçon, mon rêve n’était pas de devenir pompier ou policier, mais bien ‘un docteur’. Il n'y avait pas de médecin dans la famille, mais la volonté de devenir médecin était plus forte que tout", explique le docteur Colemont.

«Après avoir obtenu mon diplôme à Anvers, il y avait trois choix : la médecine générale, la chirurgie ou la médecine interne générale. J'ai opté pour cette dernière et me suis vite retrouvé sur la piste des maladies intestinales car je les trouvais extrêmement fascinantes et très variées. D'une part, vous devez faire un travail de détective ; le patient a un problème et vous devez le résoudre. D'autre part, vous êtes également juge d'instruction ; vous effectuez vous-même des recherches et vous en demandez à des collègues. »

Action et réaction

« Dès mon premier jour en tant que gastro-entérologue, j'ai été confronté au cancer du côlon. Et j'ai vite compris qu'en tant que jeune spécialiste, la trentaine, je connaissais très peu la maladie. Et à mon grand désarroi, j'ai vu qu'il y avait des programmes de dépistage qui fonctionnaient bien dans d'autres pays, alors qu'en Belgique, il n'y avait encore rien. Puis j'ai commencé à donner des conférences, d'abord aux médecins généralistes et plus tard aux patients. Et j'ai remarqué que lorsque je devais dire à mes patients qu'ils avaient peut-être un cancer du côlon, ils ne savaient rien de la maladie, des polypes, ils ne savaient pas qu’un simple test de selles pouvait être utile ou encore que ce cancer touche un Belge sur vingt. Pour toutes ces raisons, j'ai décidé en 2010 de créer un groupe d'action avec trois étudiants. Nous avions le nom au bout de trois secondes 'Stop Cancer Côlon' et moins d'une heure plus tard, nous avions un logo qui est toujours le même aujourd’hui ! »

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« Nous connaissons de mieux en mieux notre adversaire, le cancer du côlon. Nous savons comment il se comporte, ce qu'il fait et entraîne comme conséquences. Et nous savons qu’avec un tel adversaire, il faut être très ambitieux si on veut lutter efficacement! Nous faisons de notre mieux, mais c’est toujours difficile d'accepter que tant de familles sont touchées. Chaque jour, il y a plus d'une vingtaine de nouveaux diagnostics de cancer colorectal dans notre pays et c'est inacceptable dans un Etat-providence comme la Belgique. Surtout si vous savez que la moitié de ces cas pourraient être évités si les citoyens étaient plus informés, sensibilisés. Je dis à tous les journalistes : « Luttez contre ce cancer, en écrivant à son sujet, en fournissant des informations, en faisant du bruit ». J’espère que certaines personnes les liront ou entendront et penseront à faire ce petit test qui traîne ici depuis des semaines, qui sait... »

« Les programmes de dépistage ont plus de succès aujourd'hui que par le passé, mais il reste encore un long chemin à parcourir. C'est clair quand on regarde les chiffres : en 2019, 51,1% des personnes concernées ont passé le test en Flandre. Ce test, l'examen d'un échantillon de selles, peut sauver des vies, éviter des souffrances et réduire les coûts et de façon tellement simple ! En Wallonie, nous ne disposons pas de chiffres récents, mais les derniers chiffres montraient que moins de 20% des gens font le test qu’ils reçoivent... Comment améliorer les choses ? Les enquêtes montrent que de nombreuses personnes ne se font pas tester parce qu'elles ont peur du résultat et de ce qu’entraîne un diagnostic. Ou ils pensent qu'ils ne sont pas à risque parce qu’ils n’ont pas d’antécédents familiaux. Mais le plus gros problème, c’est que beaucoup de gens ne savent pas à quel point le dépistage est important. Il y a un vrai manque de connaissances, d'informations à ce sujet. »

Brad Pitt, personne à risque

« Je ne crois pas en une grande campagne qui puisse toucher tout le monde, mais je crois en des campagnes pour différents groupes cibles, différentes catégories d'âge et avec différentes ressources. Dans l'une de nos meilleures campagnes, nous avions écrit une lettre ouverte à Brad Pitt, alors âgé de 50 ans, disant : « Vous avez 50 ans maintenant, il est temps de passer un test de dépistage du cancer du côlon. » Son épouse de l’époque, Angelina Jolie s'était également engagée à sensibiliser le public au cancer du sein, avec un article d'opinion dans le New York Times et nous avons pensé qu'il devrait faire un effort aussi ! C'était l'actualité dans tous les journaux, des États-Unis à la Macédoine, en passant par la Lituanie et le Brésil : ‘ Un médecin belge alerte Brad Pitt avec une lettre ‘. Non, nous n'avons pas eu de réponse, mais ce n'était pas nécessaire non plus, le but était de sensibiliser au cancer du côlon. Mission réussie. Mais toutes les campagnes ne doivent pas être alarmantes, c'est certain. »

« En matière de communication, nous travaillons en ayant 2 choses en tête; imaginer que demain ce que vous écrivez soit lu par quelqu'un qui a un cancer du côlon, et imaginer que ce que je fais ou dis soit vu par quelqu'un qui a perdu un être cher à cause du cancer du côlon. Il ne faut pas blesser ces personnes et il y a des limites que vous ne devriez pas franchir. L'humour n'est pas interdit, dans une conférence par exemple, mais il faut être prudent. Je compare parfois notre asbl à un parti politique, un parti avec un seul point à l'ordre du jour : Stop Cancer Côlon. Nous avons assez de travail avec ce seul élément de programme. »

« Je rêve d'un monde sans cancer. Il y a encore un long chemin à parcourir, mais cela vaut la peine de le parcourir ensemble. »

Espoir

« Il y a quinze ans, il n'y avait pas plus de deux médicaments pour traiter le cancer du côlon, aujourd'hui il y en a au moins quinze et il y a encore des traitements à l’étude, principalement des traitements personnalisés. De nombreux progrès ont également été réalisés en termes de survie. Je rêve d'un monde sans cancer. Il y a encore un long chemin à parcourir, mais cela vaut la peine de le parcourir.  Mon père avait dix-huit ans lorsqu'il a contracté la tuberculose, une maladie qui était une condamnation à mort dans les années 40, mais il a survécu parce qu'un nouveau remède venait d'être trouvé. À l'âge de 65 ans, quatre mois après sa retraite, il est mort malheureusement dans un accident d'avion au Kenya. J'espère que je pourrai vivre assez longtemps pour connaître le jour où il s'agira d'une maladie chronique ou rare. »

Dites-le en bande dessinée

Jean – La vie, un combat qui en vaut la peine est un « roman graphique » ou plutôt un album de bande dessinée qui raconte l’histoire d’un professeur d'histoire de 50 ans confronté au cancer du côlon.

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« J'aime beaucoup la bande dessinée car c'est un support accessible pour soulever un problème grave. J'ai écrit le scénario avec le dessinateur Mario Boon. C'est une belle histoire passionnante, basée sur celle d’un vrai patient. L’album a été traduit en onze langues et récemment aussi en arabe et en chinois. Dans certains pays comme le Portugal et l'Italie, « Jean » est même utilisé dans des campagnes nationales de sensibilisation. Le succès de la bande dessinée montre qu'il y a un besoin.

Retrouvez plus d'informations sur https://stopcancercolon.be

 

BE2105261363 26/05/2021

 

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